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Sam 14 sept 2019

VILLEDIEU
ÉGLISE NOTRE-DAME DE LA NATIVITÉ
" Schubert et Mendelssohn
en trios "

Beethoven, Schumann, Schubert, Mendelssohn et beaucoup d'autres … Les romantiques allemands … que de grands noms de la musique ! Deux compositeurs et deux pièces magnifiques pour illustrer ce que ce grand mouvement artistique, ce "rêve de poète" né en réaction au rationalisme des Lumières, a apporté de fantaisie dans l'écriture de la musique dès le début du XIXème siècle : Félix Mendelssohn et son trio n° 1, Franz Schubert et son trio opus 100 dont le fameux second mouvement prend part à l'accompagnement musical inoubliable du célèbre film Barry Lyndon. Ecrite quelques temps avant la mort précoce (31 ans) du compositeur, cette sublime mélodie à l’intense expressivité, s’échange de façon très conviviale entre les cordes de ses partenaires du Conservatoire Supérieur National de Musique de Paris et le piano de Virgile Roche, jeune pianiste sanflorain "inspiré et inspirant … à la lucidité et à la maturité impressionnantes" (Ouest-France février 2018).

 

TRIO PANTOUM      
Virgile ROCHE, piano          +
Hugo MEDER, violon          +
Mélisande PONSIN, violoncelle          +

 

Le Trio opus 100 de Franz Schubert

Frantz Schubert écrivit ses deux trios avec piano en 1827 à Vienne, quelques mois avant sa disparition.

En 1822-1823 il est atteint de syphilis; sa santé ne cesse alors de se dégrader. Il tirera de son malheur une musique de plus en plus profonde et émouvante, au plus près de la souffrance et de la mort qui le guettent.

Le Trio en mi bémol majeur pour piano et cordes no 2, (op. 100) est une œuvre de musique de chambre, l'une de ses dernières compositions, datée de novembre 1827, destinée à être jouée dans l’intimité de l’intérieur de nobles ou d’amateurs fortunés.

Alors que la plupart de ses chefs-d'œuvre acquièrent une célébrité posthume, rançon de sa très courte vie (31ans), le 2ème mouvement « Andante con moto » du second trio rencontre alors une très grande popularité. Très récemment, celle-ci se réactivera lorsque Stanley Kubrick l’utilisera pour son célèbre film Barry Lyndon (tourné à la seule lumière des bougies) dépeignant l’Irlande du XVIIIe siècle. Ne trouvant pas assez d’intimisme dans la musique du XVIIIe siècle (Schubert étant le musicien de l’intimisme par excellence) pour exprimer certaines situations et sentiments du film, il décida de prendre une composition d’un musicien du XIXe siècle. Du fait de l’intemporalité de cette œuvre, l’anachronisme ne se remarque pas. On retrouve le trio dans de nombreux autres films (dont L’immortelle avec Jean Reno)

Sans doute dérivé du folklore suédois, cette sublime mélodie à l’intense expressivité, s’échange de façon très conviviale entre les cordes et le piano. Ces derniers fusionnent dans un rythme à la fois plein de vitalité, de légèreté et d’accents plus dramatiques. C’est l’une des manifestations les plus nues du compositeur ; comment rester insensible à cette magnifique montée en puissance initiée vers les 4mn20 ?…

Les frères Renaud et Gauthier Capuçon ont joué cette pièce, avec Frank Braley au piano, aux Nuits Musicales d'Uzès en juillet 2005. https://www.youtube.com/watch?v=3kuFzjkUcLw


 

Le Trio n°1 de Félix Mendelssohn

Le Trio pour piano, violon et violoncelle n°1 en ré mineur, op. 49 (MWV Q 29) du compositeur allemand Felix Mendelssohn figure parmi les œuvres de musique de chambre les plus acclamées du compositeur, n’ayant d’égal que son octuor à cordes, op. 20.

D’abord achevé en juillet 1839 à Francfort, le trio a été révisé et présenté sous une deuxième version quelques mois plus tard, le 23 septembre 1839. En effet, Mendelssohn a suivi les conseils d’un autre compositeur, son ami Ferdinand Hiller, et a révisé la partition de piano. Cette seconde version a pris une forme beaucoup plus romantique, proche du style de Robert Schumann, le piano étant davantage mis de l’avant. Schumann, quand il a entendu le trio, en a fait l’éloge en le comparant à ceux de Ludwig van Beethoven et de Franz Schubert et qualifiant Mendelssohn de « Mozart du XIXe siècle, le plus rayonnant des musiciens ».

Le trio no 1 est contemporain des quatuors op. 44 du compositeur. Sa création a eu lieu le 1er février 1840 à Leipzig avec le compositeur au piano, David au violon et Wittmann au violoncelle. L’œuvre a été publiée l’année même de sa création.

La pièce de Mendelssohn interprétée par le Trio Harma via ce lien : https://www.dailymotion.com/video/x6f1xvp se divise en 4 mouvements :

Molto allegro ed agitato

Le premier mouvement, qui suit la forme sonate, commence par introduire le thème principal, cantabile, confié au violoncelle avec un accompagnement syncopé par le piano. Par la suite, le violon se joint au violoncelle pour présenter une version dénaturée du thème. La transition vers le second thème s'opère par différentes variations sur le thème principal. Ce second thème, en la majeur, est introduit par le violoncelle. Dans le développement, qui est principalement en ré mineur, Mendelssohn combine les deux thèmes. Enfin, au moment de la récapitulation, le compositeur ajoute une contre-mélodie au violon qui vient appuyer le retour du thème principal.

Andante con moto tranquillo

Le second mouvement est introduit par une mélodie de huit mesures au piano, à la main droite. L'accompagnement est séparé entre les deux mains, comme c'est le cas dans plusieurs des Romances sans paroles de Mendelssohn. La ligne de basse du piano se déplace d'une façon méthodique, maintenant un équilibre délicat avec l'accompagnement et la mélodie. Une fois le thème principal déclamé par le piano, il est répété par le violon, avec le violoncelle en contrepoint.

Scherzo

Le scherzo, bref et léger, est pour l'essentiel en forme sonate. Comme dans le deuxième mouvement, le thème principal est d'abord joué au piano. Cependant, celui-ci est vite relégué au rang d'accompagnateur fragmentaire. Le fil conducteur de ce scherzo — qui ne disparaît que durant la partie centrale, plus lyrique — est un motif rythmique suivant son thème principal et similaire au matériel utilisé dans le premier mouvement.

Finale

Après la refonte du trio selon les conseils de Hiller, le finale est le mouvement ayant subi la plus grande transformation. En outre, et ce n'est pas surprenant, sa partition de piano est beaucoup plus active. Le morceau fait appel à diverses techniques au clavier : accords fermés, vastes arpèges, octaves chromatiques... Les moments cantabile viennent offrir un contraste rafraîchissant. Le trio se termine par une pétillante coda en ré majeur.

 

Le romantisme et la raison

Le romantisme se présente, de façon fondamentale, comme une réaction aux Lumières. Une réaction au rationalisme de celles-ci. Une constante de la pensée romantique consiste à dire que la raison échoue à connaître le tout de la réalité. Sans doute elle en explique bien une partie : mais pas le tout. La partie invisible, la partie immatérielle de la réalité lui échappe. Dans sa folle ambition, la raison a néanmoins nié cette impuissance ; elle a voulu tout connaître - quitte à réduire le tout à la partie. Le XVIIIe siècle a nié les réalités inaccessibles à la raison. On a amputé la réalité de toute une partie de la réalité. Le romantisme dénonce cette escroquerie. Derrière la réalité appauvrie que montre la raison se trouve encore une réalité irrationnelle aux richesses infinies. Derrière les choses visibles, derrière les choses matérielles on trouve encore les choses invisibles, les choses immatérielles. A la conception étroite de la réalité que prône le rationalisme, le romantisme oppose une conception large.

Mais que la raison ne puisse connaître cette autre partie de la réalité ne signifie pas que cette autre partie de la réalité reste en tout inconnaissable. Elle se révèle à nous grâce à une autre de nos facultés : non pas notre raison mais notre imagination.

Notre imagination : voilà bien ce que cache le terme fantaisie - une fantaisie que nous retrouvons sans cesse à lire les textes romantiques en version française. Mais si nous nous référons à la langue allemande, nous y trouverons, à la place, le terme Phantasie. Malgré les apparences, le terme Phantasie ne signifie pas tant notre français fantaisie que notre français imagination. Dans la langue allemande, Phantasie a bien cette signification première : imagination - Phantasie désigne bien cette ancienne catégorie philosophique, cette ancienne faculté de connaître que la tradition rationaliste a méprisé, que la version française elle-même a occulté. Il y a, avouons-le, quelque ruse à dire, en français, non pas imagination mais fantaisie. La fantaisie française renvoie à une bizarrerie aimable mais peu sérieuse. On ôte alors au romantisme - mine de rien - un peu de sa dignité philosophique… Mais, répétons-le, le romantisme se réfère bien à notre imagination comme à une faculté de connaître alternative à notre raison - une faculté de connaître qui nous ouvre à cette autre réalité qui lui échappe.

Dans la théorie classique, rappelons-le, la musique se pense, en termes cartésiens, comme un phénomène physique exprimable en termes mathématiques. Venue de France, cette théorie sensualiste, cette théorie scientifique de la musique a, au XVIIIe siècle, connu une réelle vogue en Allemagne - où elle a comblé les attentes de la bourgeoisie montante. A telle enseigne que, au XVIIIe siècle, en Allemagne, elle semble à tous être la seule possible… La théorie romantique de la musique, au contraire, cette théorie spiritualiste, cette théorie mystique, semble à tous être révolutionnaire.

La musique romantique se présente comme un rêve de poète ou, pire, de philosophe.

Le Trio PANTOUM

Hugo Meder (violon), Mélisande PONSIN (violoncelle) et Virgile Roche (piano) ont fondé le trio Pantoum en 2016, à l'orée de leur parcours au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. Sous la direction d'Emmanuelle Bertrand puis de Claire Désert, ils ont alors entamé un travail approfondi du répertoire de la musique de chambre pour cordes et piano, qu'ils ont la chance de poursuivre dans la prestigieuse classe du Trio Wanderer au Conservatoire à Rayonnement Régional de Paris, où ils ont été admis en octobre 2018.

Hugo, Mélisande et Virgile ont également reçu les conseils de musiciens de renommée internationale tels que Marc Coppey, Alexis Galpérine, Emmanuel Strosser ou encore Michel Moragues, et ont eu la chance de rencontrer des membres des quatuors Ébène et Modigliani au cours de master classes au CNSMDP.

En mars 2019, le trio Pantoum s'est produit à la Philharmonie de Paris (grande salle Pierre Boulez) dans le cadre des préludes aux concerts de l'orchestre de Paris.

Cet été, ils sont invités par Claire Désert à l'académie du festival international de piano de la Roque d'Anthéron, et seront artistes en résidence lors du Festival Millesources en Haute-Corrèze.

Le pantoum


C'est un poème à forme fixe, emprunté à la poésie malaise, composé d'une série de quatrains à rimes croisées, dans lesquels le deuxième et le quatrième vers d'une strophe sont repris par le premier et le troisième vers de la strophe suivante, le dernier vers du poème reprenant en principe le vers initial.

"La règle absolue et inévitable du Pantoum (...) veut que, du commencement à la fin du poème, deux sens soient poursuivis parallèlement, c'est-à-dire un sens dans les deux premiers vers de chaque strophe et un autre sens dans les deux derniers vers de chaque strophe. Le pantoum est à l'origine un poème érotique et il a conservé ce caractère dans les Pantoums malais de Leconte de Lisle" (Morier 1961, 1975).

Histoire du pantoun en France et en Occident

Le pantoun français dérive du « pantun berkait » malais, c'est-à-dire « pantoun enchaîné », par son mécanisme de reprise des vers de strophe à strophe. Un pantoun malais en tant que tel est constitué d'un quatrain unique.

« Dans une des notes de ses Orientales, Victor Hugo, en 1828, avait cité, traduit en prose, une poésie malaise de cette forme, d'où se dégageait une séduction singulière, due non seulement à la répétition des vers selon un certain ordre, mais au parallélisme de deux idées se poursuivant de strophe en strophe, sans jamais se confondre, ni pourtant se séparer non plus, en vertu d'affinités mystérieuses.

Un poète érudit, Charles Asselineau, essaya de constituer un poème français sur ce modèle, et y parvint. Théodore de Banville marcha sur ses traces ; Leconte de Lisle écrivit à son tour quelques pantoums, sur un sujet qui ramenait le poème à son pays d'origine, car il les intitula : Pantouns Malais. C'était, en cinq courtes pièces, une histoire d'amour, terminée par les lamentations de l'amant, meurtrier de la femme infidèle. » (Auguste Dorchain, in L'Art des vers)

C'est dans la note XI des Orientales que Victor Hugo donne le poème malais reproduit ci-dessous, traduction en prose d'un poème malais par un érudit de l'époque, Ernest Fouinet. Il écrit :

« ...Nous terminons ces extraits par un pantoum [sic] ou chant malai [sic], d'une délicieuse originalité :

Les papillons jouent à l'entour sur leurs ailes ;
Ils volent vers la mer, près de la chaîne des rochers.
Mon cœur s'est senti malade dans ma poitrine,
Depuis mes premiers jours jusqu'à l'heure présente.

Ils volent vers la mer, près de la chaîne de rochers...
Le vautour dirige son essor vers Bandam.
Depuis mes premiers jours jusqu'à l'heure présente,
J'ai admiré bien des jeunes gens ;

Le vautour dirige son essor vers Bandam,...
Et laisse tomber de ses plumes à Patani.
J'ai admiré bien des jeunes gens ;
Mais nul n'est à comparer à l'objet de mon choix.

Il laisse tomber de ses plumes à Patani.
Voici deux jeunes pigeons !
Aucun jeune homme ne peut se comparer à celui de mon choix,
Habile comme il l'est à toucher le cœur.

Nous n'avons point cherché à mettre d'ordre dans ces citations. C'est une poignée de pierres précieuses que nous prenons au hasard et à la hâte dans la grande mine d'Orient. »

Cette note contient une coquille, l'orthographe pantoum (avec un m) étant donnée en lieu et place de pantoun (avec un n), du malais pantun.

Théophile Gautier adapta très librement le pantoun, n'en gardant que le thème des papillons sans soucis de la forme, puis Charles Asselineau et Louisa Pène-Siefert écrivirent des pantouns plus proches du modèle asiatique.

Il faut cependant attendre 1872 et Théodore de Banville qui décrivit la forme dans son Petit Traité de poésie française, propageant la coquille de Victor Hugo pantoum, pour que le poème malais connaisse une réelle acclimatation en France. Les parnassiens s'emparèrent de la forme, et Leconte de Lisle corrigea la coquille de Hugo. Sous l'impulsion française, le pantoun gagna ensuite l'Allemagne, l'Angleterre puis l'ensemble de l'Occident.

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